Carte blanche à Alain Moatti

Les Imaginaires à l’œuvre

Nous vivons un monde de transformation. Transformation dont les deux grandes directions sont le numérique et l’environnemental.

Transformation de la production d’énergies fossiles en production d’énergies renouvelables, transformations des moteurs thermiques en moteurs électriques ou hydrogènes.

Transformation de l’organisation des espaces de travail et d’habitation post-covid : méthodes agiles, organisation de partage, Flex-office, tiers-lieux.

Transformation de l’idée de propriété où l’on préfère jouir des choses plutôt que de les posséder : voitures, motos, coworking et coliving.

L’informatique nous libère désespérément de plus en plus de l’unité de lieux. Le Métavers produit déjà un monde virtuel parallèle où l’on pourra consommer sous l’identité que l’on s’est choisie. 

Être informé sur tout cela peut nous alerter sur les faits et comprendre ce que cela va changer. C’est assurément un premier pas indispensable mais cela ne suffit pas à forger notre détermination ni à libérer nos énergies.

Si nous avons besoin de ce savoir, nous avons besoin aussi de croire, c’est à dire de donner un sens à ce savoir : rêver pour arriver à se résoudre au changement et trouver notre place. Nous devons prendre nos privilèges d’être informés comme une responsabilité pour autrui, et projeter toute cette connaissance dans un imaginaire.

L’imaginaire relève de la médiation, non seulement celle du langage mais encore de tous les médiums : la peinture, la photographie, la BD, les films, l’architecture…

En architecture, l’imaginaire c’est l’invention d’usages qui subliment le programme. Ces usages viennent de la compréhension du monde contemporain.

C’est par les usages réinventés que les lieux produiront des espaces contemporains par enchevêtrement, mixité, pratique simultanée de divers publics. En un mot par une mise en commun. 

Ici, l’utilisateur n’est pas seulement passif ou consommateur. Il participe à ce renouvellement de l’usage des lieux où il a envie de rester pour entrer en Relation. 

La Beauté c’est la qualité de cette Relation. La Beauté détruit nos certitudes avant de nous offrir une exigence plus grande pour nous même. La Beauté nous remet en question, en vie. Nous ne pouvons pas y accéder seul, la relation est indispensable. La beauté nous transporte dans un imaginaire.

Entre l’imaginaire et le réel, c’est toujours l’imaginaire qui l’emporte. Le réel tient uniquement à ce qui se présente « im-médiatement » c’est-à-dire sans médiation. 

Pour cette nouvelle année 2022 et les années à venir, je vous souhaite l’abondance de la mémoire et toutes les folies de la création afin d’imaginer un monde où la priorité est de conserver l’hospitalité de notre planète.

Alain Moatti